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Dessins de Jola Zauscinska

détail

exposition de dessins du 8 au 29 novembre 2018

l’exposition est encore visible le vendredi 30 nov de 14 à 19h

vernissage le samedi 10 novembre à 16h

en présence de Yannick Haenel

Rubrique Haenel Charlie Hebdo


lundi 19 novembre à 20h
à HCE Galerie

Rencontre avec Rachid Koraïchi

la résidence de création

Création et destin de l’oeuvre 7 Variations Indigo
Trois ans de création à Alep, 2002

film


Jusqu’où le trait peut il conduire ?

Cette exposition est l’aboutissement d’une résidence d’artiste à HCE Galerie. Dans l’espace de la galerie, mais aussi dans ceux de la Basilique de St Denis toute proche, dans l’étude de traités d’anatomie, entre la peinture de la Renaissance italienne et celle de Francis Bacon, la lecture de Tadeusz Kantor, Jola Zauscinska a eu l’occasion d’explorer ses tropismes vers la représentation des corps ouverts à une dimension sacrée. Elle incarne dans son champ d’énergie ce qui se « dessine » ou se révèle dans l’ampleur du geste et la vivacité du trait, le passage vers ce lieu énigmatique où le corps s’échappe quand il est ainsi violenté par d’inqualifiables mouvements.

Bacon évoque le cri originel où le corps revient, se vide de lui-même : l’installation de Jola ouvre sur un horizon du même genre, irreprésentable, mais avec une présence silencieuse et troublante dont on s’approche prudemment en cherchant à tâtons quelques jalons.

Les corps sont frappés par l’intervention de quelque chose de brusque et de brutal, une force imprévisible, une fêlure criante, une convulsion qui les met à genoux en les dénudant. On cherche le corps mis à nu, mis à vif : est- il sous la peau, dans la chair ou la viande, les pulsations du sang dans les vaisseaux ? Qu’en est il de la puissance du corps et des mouvements secrets qui l’habitent, accessibles au scalpel, aux lacérations et incisions…N’est il pas dans cette posture de génuflexion, qui sous la soumission apparente révèle une attente, une adoration, une supplique, une adresse à l’absolu ? Les corps de Jola se tendent vers le ciel comme des offrandes rituelles exposées dans un sacrifice.

Le vertige du trait

Le trait se tient au plus près de la pulsation du corps, de son élan vers un état indéfini, de son passage vers un ailleurs ; Il nous entraîne, nous « attire » sur son tracé dans la profondeur du visible. Même s’il est fait au pastel gras le trait incise plus qu’il ne délimite, il est le trait qui dessine et blesse, qui atteint et porte atteinte, qui touche et fait mal en même temps. Il fait du corps un « terrain de vérité » en creusant lignes, plis et rides, en tirant les lèvres de la bouche ou du sexe vers des lèvres de plaies, vers la plainte, à la tangence du plaisir et de la souffrance. Il ne se décide pas entre le dedans et le dehors, entre l’ici et l’ailleurs, il garde son intensité dans son tracé de « passage à la limite », dans ce tremblé du sens où l’on se demande ce qui advient de ce corps frappé au plexus. Le trait se retire, disparait dans le fond d’où il vient et où il ramène.

Nudité ou dénudation ?

La nudité n’est pas atteinte : infiniment proche et donnée à toucher au désir, elle se dérobe pourtant dans le secret de l’intimité. La mise à nu est un mouvement qui ne cesse de se reprendre et de se relancer, le plus vif des mouvements, qui s’apparente à la mort, cette ultime force qui survient et nous arrache tout. Le dessin de Jola suit l’élan de cette fièvre sensuelle qui se lève, de l’agitation qui se mue en ardeur amoureuse et ne peut que s’évader dans l’excès, s’excéder. La mise à nu est l’effet dune force qui frappe les corps de stigmates, les met à genoux, les met en pronation ou en supination, comme peuvent le faire les mains et les pieds dessinés et codés dans l’éloquence mystique, offerts à je ne sais quel sacrifice ou incantation…

Au-delà des corps et de la violence.

C’est aussi l’au-delà de l’exposition et de l’installation, le lieu suggéré par ce mouvement infini de dénudation et la présence qui demeure quand le regard a été ainsi emporté et violenté. A l’horizon de l’artiste il y a quelque chose qui émane de l’univers de Giotto ou de Piero de la Francesca, sur lequel elle pose des mots légers : « une robe couleur de ciel semé d’étoiles », le vêtement d’un corps glorieux. Peut être une façon de se tenir au calme après cette « question effrayante sur l’amour » suggérée dans la critique de Yannick Haenel. L’entrée dans un monde archaïque, où l’on passe en clandestin, en fraude, avec de violentes douleurs dans le cœur et l’inquiétude de l’étrangeté, où l’on se sépare silencieusement du reste du monde pour parler la langue des secrets, avec la mort qui se mêle à tout et ne cesse de mordre…

Pendant toute cette exposition HCE Galerie se fera un plaisir de mettre en forme l’ultime pensée de derrière la tête qui se sera installée dans l’esprit de chacun au terme de cette traversée

HCE Galerie / Georges Quidet

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