Yao Metsoko

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Né au Togo en 1965, Yao Metsoko s’ est installé en France en 1985. Depuis l’enfance il peint et dessine. A 20 ans il a déjà fait les rencontres qui vont bouleverser sa vie d’artiste et lui donner une voie très personnelle : Chagall, Clem Lawson , Ousmane Sow

A l’image de l’arbre qui rayonne d’autant plus qu’il s’enracine profondément dans le sol, il ne cesse de puiser dans les mines de son enfance, dans le trésor des symboles et des mythes qui animent la vie quotidienne au Togo, dans la sagesse traditionnelle des proverbes. Proche de la terre et poétique, il exploite la fécondité de cette veine, en travaillant tous les thèmes, la femme, l’esclavage, les mystères de la vie … comme autant d’occasions de construire des passerelles entre traditions et modernité; Dans ses peintures et ses sculptures il crée formes, volumes et couleurs en utilisant le plâtre renforcé de filasse, des matériaux de densités différentes, des techniques mixtes, de l’acrylique pour faire jaillir l’unité et l’harmonie de l’hétéroclite, jusqu’à devenir cet alchimiste qui distille l’essence des questions ancrées dans la terre noire de son sol africain.

Il a participé à de nombreuses expositions, à des salons et festivals qui mettent en exergue les passerelles et les métissages culturels.

Il a élaboré un langage plastique très personnel qui remonte à la source des symboles, à la force de réunion du visible et de l’invisible dans l’intériorité des choses, à leur rythme constitutif. Un langage de formes, de couleurs et de mouvements qui met donc en avant l’élément poétique et chantant des choses (des rimes, des refrains, des strophes…) et tout ce qu’il peut y avoir de « dansant » dans ce rythme qui fait vibrer les formes et les parcourt comme une onde vitale.


Expositions Individuelles
– Les forces de la terre ” hôtel de ville de Pierrefitte (93)

-du 10 au 18 mai 2011 sur « l’abolition de l’esclavage »-Salle des pas perdus – UNESCO-Paris

– SAUVAGE! commissaires d’exposition : Fiona Meadows & Giscard Bouchotte, Maison M à Saint-Denis

-1ères Assises de la Coopération décentralisée du Conseil Général des Yvelines (78) – Invité d’Honneur : le Togo

-Galerie Mailletz , Paris 5ème

-Galerie Philippe Lawson, Paris 7ème

-Galerie 14 ,Toucy (Bourgogne)

-Restaurant/galerie le MASSAI MARA, Paris 19ème

-« 5ème Festival de Lutte contre les discriminations… » Université Paris13

Collectives
-Kirshes-ban.de (Galerie en collaboration avec Espace Canopy), Koln , Allemagne

-l’Art pour la Paix , fév.2014, UNESCO Paris

-Human Arts World 2012, Fort du Vert Galant, Wambrechies

-Invité d’Honneur au « Festival Afriques 2012 », Wambrechies

-« France ô ma France », Sous la culée rive gauche du Pont Alexandre3. Sous le patronage de l’association « LES GARDIENS DU PONT » à partir du Projet Jean-Michel WILMOTTE, Pierre CORNETTE DE SAINT CYR, Alain DEPARDIEU.

-22ème Festival International de Géographie à St-Dié-des- Vosges (Togo, invité d’honneur et médaillé d’or)

– Du Noir au Blanc de Marie-Laure CROIZIERS au 6b , Saint-Denis

-Gala Dekkal Thiossane & le Comité France d’organisation du Festival Mondial des Arts

Nègres, Lancement du 3ème Festival Mondial des Arts Nègres au palais de l’UNESCO-Paris

– African2010 avec l’AMREF au Pavillon Cambon, Paris 1er

-Congo Lipanda 2010 , (cinquantenaire des indépendances…) au 6B à Saint-Denis

– Salon International du livre et des Arts de l’Haÿ-les-Roses, 3ième Edition 2010

– PAMOJA 2010 (cinquantenaire des indépendances…) à l’Unesco, Paris 7ème

– « Pleins feux sur le Togo, Regards croisés » – Médiathèque de Montbéliard

-Ricky Ford, Philippe Levy-Stab et Yao Metsoko, Galerie 14 à Toucy en Bourgogne

– « Cinquantenaire des indépendances: les Arts de l’Afrique Contemporaine », Montmagny 95

– « Journées du Patrimoine 2009,Exposition du fonds d’arts plastiques municipal», Pierrefitte

– Exposition vente d’art & d’artisanat de l’Afrique contemporaine, les Salons de la Grande Chancellerie de la Légion d’Honneur – Palais de SALM, Paris 7ème

Commissaire d’exposition: Joëlle le Bussy
– 1er Salon international d’art contemporain plein air-PLACE AUX ARTISTES! Paris 5ème

– Galerie Métanoïa, Paris 4ème

– 4ème Biennale de Sculpture de Montmagny, Montmagny (95)

– La semaine africaine de l’UNESCO–2007,2009,2010 avec la délégation togolaise Paris 7ème

– Galerie Les Vergers de l’Art , Paris 3ème

– « 13ème Rencontre d’Art Contemporain africain » au Château de Villiers à Draveil (91)

– Galerie 14 , Toucy ( Bourgogne )

– Sous le Pont AlexandreIII – Paris. Commissaires d’exposition : Marie-Laure CROIZIERS et Patrick BRUNIE. « Fenêtre sur l’Afrique… », Paris 8ème

– Conseil Général du Puy-de-Dôme, « Art d’Afrique: là-bas, ici… », Clermont-Ferrand

– Maison d’Art – Domaine du Canalet, Av. Joseph Vallot 34700 LODEVE

– « Rencontres africaines »ACANTHE Village d’artiste à la Grange du Prieuré- La Ferté-Loupière 89110

– Centre culturel Christiane Peugeot, Paris 17ème

– Hôtel de Ville de Pierrefitte, Pierrefitte/Seine

– Invité d’Honneur au 51ème Salon de l’UAP( l’union des artistes plasticiens de St-Denis )

– 1ère Biennale Internationale de Sculpture Contemporaine en Bourgogne à Nolay-
« 1er Prix de modelage »

– « Carré Davidson » – Tours

– « Festival des cultures Afro et Métissées BISSO BESSE – Lyon ; « Mémoire Vive » – Mairie du 9ème

– 1er espace du cinéma noir de France, « Images d’ailleurs » Paris 5ème

– Toit de la Grande Arche, « Ouverture, Regard du monde », la Défense

– 25ème anniversaire de l’ACCT, «Voyage en Francophonie », Espace Branly, Paris 7ème

-Ancien musée des automates, Quartier de l’horloge, Paris 3ème

Exposition HCE : Le Monde de Yao

En guise de coryphée placé en situation élevée pour être vu et entendu de toute la troupe des oeuvres exposées, l’oeuvre intitulée Les Portes de l’éveil annonce les séries picturales, les suites d’images et de symboles qui se propagent en flux continu depuis un centre secret. Stylisé, solidement campé sur le trait sûr de son dessin, un gong dans une main, un cauri dans l’autre, le personnage présente les 74 portes sur sa tunique, autant de clés pour rentrer dans ce monde. Sa tête rouge d’animal totémique en fait un guerrier mais aussi un protecteur et un guide sorti du sérail.

Des enveloppes s’ouvrent sur des kyrielles de poissons qui ont traversé la peinture dont ils gardent les traces, formes, couleurs et graphismes ; ils déplient à l’infini le message de l’eau, la tranquille certitude de l’apaisement et du commencement ; d’autres, plus petites, cadrent des enchaînements de « Sapeurs », incisifs pastiches de masques africains empreints d’une élégance européenne toute postiche .
Deux séries parallèles, La Cité et La Nature traduisent dans le langage plastique spécifique à l’artiste – un étonnant travail sur les ombres, silhouettes et esquisses noires, dans des positions littéralement acrobatiques évoquant l’univers chaotique et impossible de la pantomime, l’impétuosité des mouvements de la nature ou de la ville qui échappent au cadre du tableau, leur fusion en un élan spirituel.
La série La danse des Dieux explore entre le burlesque des gesticulations et la chorégraphie du ballet les figures des puissances qui gouvernent le monde.

Avec la série des Mystères de la vie le coryphée ouvre les portes de l’intime : une femme cubiste, sculptée dans la terre parsemée de quelques touffes d’herbe à la manière de Ousmane Sow, trouve une assise bien particulière en ce monde où elle règne tandis qu’ un vêtement traditionnel stylisé sur cintre épouse les tracés de la vie à l’oeuvre que les femmes font cheminer mystérieusement entre les contraintes de l’utile.

Enfin cette exposition se centre sur la série des « Icare », ce mythe que Yao a découvert dans ses livres d’école au Togo qui, sous des couleurs ou une version africaines insiste sur la proximité de l’envol et de la chute, de la sculpture et de la peinture, le tout dans une symphonie de bleu et de brun, dans une osmose de la terre et du ciel.

Chaque série impose ses reprises, ses changements de régime, le jaillissement de ses formes et de ses couleurs, mais aussi le calme et l’évidence de la composition, ouvrant la porte à des enchaînements d’interrogations sur le monde.

L’artiste Yao Metsoko se nourrit des symboles de la culture traditionnelle de son enfance qui, à l’image de l’arbre, enfonce ses racines d’autant plus profondément qu’il veut étendre ses branches. Plus il revient à la source, plus il en découvre les ressources, les ramifications. Cette culture d’origine ne cesse de muter, de se greffer sur des cultures de rencontre, de s’hybrider, de sortir du cadre étroit de son identité pour se re-identifier, c’est un flux dynamique en perpétuelle refonte. Sans esprit de revanche ou de revendication, il ré-emprunte à l’art occidental ce que celui-ci a emprunté à l’Afrique, s’inscrivant sereinement dans la circulation des codes culturels. L’artiste habite sa culture comme un sol et un ensemble de possibles ouverts et inventifs dont il exploite la fécondité. Il en donne une version artistique comme un ensemble de ressources entre lesquelles on peut circuler et s’interroger.

Nous aimons dans cette peinture la vie qui anime les symboles, la force avec laquelle ils reflètent un monde mythique dont les clés nous échappent, l’énergie qui les fait migrer de leur monde d’origine pour se déployer devant nous. La peinture met en scène cette migration des images, elle déploie un jeu de formes élémentaires en analogie avec le jeu du monde tel qu’il s’agence ou s’assemble pour faire monde. Ainsi Le gong, instrument de communication du griot glisse t-il vers la corne d’abondance qui offre les choses au rayonnement céleste, la corolle qui fait jaillir une effloraison de couleurs, la jupe de cette femme sculptée dans la terre s’ouvrant sur un continent noir de troubles et de frissons. On le retrouve enfin métamorphosé dans les ailes d’Icare, en forme de calice qui élève vers la divinité de la lumière l’ingéniosité toute humaine du héros. Cette peinture inventive élabore et condense dans la plénitude de ses images toutes les connexions dans le temps et l’espace qui rendent toute vie vertigineuse.

La danse paraît bien être au coeur de cette circulation dans la mesure où elle reflète l’ordre cosmique. La Danse des Dieux est le ballet des forces qui mènent le monde; le mouvement y crée la figure, la forme et la couleur qui ne correspondent plus à des apparences du réel mais au rythme profond de toutes choses. Prise dans le travail du rêve, la main en mouvement de Yao Metsoko glisse sur l’épaisseur et le relief du fond, y fait naître des formes énigmatiques où s’attardent des sursauts de ciel, de mer, d’écume, d’espaces stellaires, d’atmosphères en dialogue, d’un monde en connivence. Voilà une peinture à la couleur gourmande, légère et effervescente, gorgée de savoirs et de saveurs, de plénitude qui développe des séries convergentes pour rendre visible « l’écume » d’une culture quand elle est habitée par un artiste qui l’ouvre à toutes les cultures et la relance dans le « jeu du monde ».

Georges Quidet pour HCE Galerie


La chute d’Icare

Il frôle à tâtons votre âme
Comme un musicien son clavier
Avant de déchaîner l’harmonie;
Il vous stupéfie peu à peu,
Prépare votre frêle nature
Au choc céleste
Par des marteaux légers, lointains,
Puis proches – puis si lents
Qu’on peut reprendre son souffle,
Laisser se calmer son cerveau –
Un seul coup de tonnerre – impérial –
Scalpe votre âme et la met à nu.
Quand les vents prennent les bois dans leurs pattes
L’univers – reste coi.

(Emily Dickinson)

Avec la série des « Icare », Yao fait la peinture de ce choc céleste qui frappe l’infortuné héros.
Un choc céleste fait exploser cette harmonie bleue du ciel dont toutes les particules inondent le tableau. Frappé entre les épaules, Icare se retrouve séparé de lui même : ses ailes ne fondent pas, elles continuent leur vol sous les apparences du calice, le calice étant ce objet qui élève son contenu à la consécration de la lumière, ou du gong, cet instrument d’annonce pour le griot.

Bien sûr qu’à force de s’élever vers la lumière du soleil, cet Icare noir savait qu’il serait frappé et que sa chute est proche
Ou, peut être n’est ce pas une fuite, Aurore, et es-tu emportée irrésistiblement vers quelque chose, dis-moi ? Sais-tu, Aurore, qu’on ne peut jamais dépasser l’horizon ? Si vite qu’on vole, si puissant qu’on soit, si résolu qu’on ait la tête et si coulant que soit ton beau corps souple, chaud, brun et juste que j’ai tenu une fois ou deux dans mes mains – à peine tenu : le temps de te toucher et de te lâcher – si bien construite que tu puisses être pour pénétrer dans les magiques horizons, jamais tu ne les dépasseras. Là où tu es, là où tu restes, là où tu demeures immobile, le monde est pareil à celui que tu désires.

L’homme, on a dit qu’il était fait de cellules et de sang. Mais en réalité il est comme un feuillage. Non pas serré en bloc mais composé d’images éparses comme les feuilles dans les branches des arbres et à travers lesquelles il faut que le vent passe pour que ça chante.
On a l’impression qu’au fond les hommes ne savent pas très exactement ce qu’ils font. Ils bâtissent avec des pierres et ils ne voient pas que chacun de leurs gestes pour poser la pierre dans le mortier est accompagné d’une ombre de geste qui pose une ombre de pierre dans une ombre de mortier. Et c’est la bâtisse d’ombre qui compte.

Comme dans ce poème d’Emily Dickinson, Icare a écouté la voix menaçante de ce « Il » transcendant qui prépare sa chute avant de lui asséner le coup fatal. Il sait que ses ailes sont gonflées de l’air subtil de l’ingéniosité, mais que toute entreprise humaine tient à des arrangements de bouts de ficelle. Yao Metsoko ne raconte pas l’aventure d’Icare, il produit dans un ciel de peinture ce « choc céleste »

Au bas du tableau la ligne verte de l’horizon, indépassable, infranchissable situe la scène dans un ailleurs inaccessible à ceux qui sont limités et cadrés par la vie ordinaire, insensibles au drame de la chute, indifférents.
Frappé, séparé de ses ailes, tordu sur lui même et disloqué, le corps d’Icare n’est plus qu’une sculpture de glaise, de terre avec la trace des couteaux et ciseaux, figée dans l’attitude des bras levés qui implorent le ciel de manière exclamative.
Le ciel n’est plus l’azur, il a littéralement éclaté sous la puissance du choc et ses particules se dispersent dans tout l’espace .Il propage le cri muet et assourdissant d’Icare dans un bleu hypnotique.
Les ailes, omni présentes dans l’œuvre du peintre sous la forme de gong ou de calice, les instruments de l’offrande sacrée, abandonnent le héros et poursuivent leur ascension avec ce précieux viatique d’ingéniosité.

Il existe au moins 4 versions d’Icare avec cette même symbolique et le même langage pictural, avec une dominante de bleu. La variation porte sur le traitement du corps d’Icare, son incarnation, sa désincarnation, voire sa transformation en un corps glorieux, quasi translucide. La figuration et la couleur expriment littéralement, c’est-à-dire pressent au dehors les émotions et les mouvements de ce corps en chute libre. Icare expire violemment l’azur qui lui gonflait les poumons en volutes tourmentées de bleu qui viennent « souffler » le paysage en dessous : tout ce bleu qui étire le drame à l’infini n’est que le dernier souffle, le dernier cri, la protestation contre l’indifférence du monde. Deux traces de rouge font saigner discrètement la toile et dans les airs la circulation des bleu s’affole, proche de la commotion.

Avec cette série Yao Metsoko continue de s’inscrire dans de multiples réseaux symboliques et mythiques pour mettre à l’épreuve son langage pictural qui se charge, se tend d’une extrême densité, d’une émotion intense, explosive et spasmodique, avec le même succès que lorsqu’il mettait en place un langage chromatique spirituel et joyeux. On retient son souffle devant la conflagration bleue qui frappe le palmier au bas du tableau ; le pouls ralentit quand le regard hypnotisé ne se détache plus des vibrations bleues du ciel. Des formes et des couleurs présentes dans cette série on peut dire ce que Emily Dickinson-encore elle !-suggérait de certains de ses mots : « Un mot peut vous inonder quand il vient de la mer ».Issues de ce choc céleste, les formes de cette série sont « à couper le souffle !

HCE Galerie


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